EXCLUSIF- Exportations de bauxite : les dessous de l’affaire ANAIM/OGC/Antaser…

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L’affaire impliquant l’Agence Nationale d’Aménagement des infrastructures minières, l’Office Guinéen des Chargeurs et la compagnie belge Antaser, spécialisée entre autres dans le cargo tracking, est au centre d’une polémique qui a suscité la curiosité de Médiaguinée. Les documents que nous vous révélons ici lèvent le voile sur les faits jusque-là relatés.

Au commencement, il y a eu effectivement ce contrat signé le 2 février 2012 (voir document1) par lequel l’ANAIM donnait mandat à l’OGC de procéder à l’élaboration d’une base de données statistiques indiquant les flux des cargaisons des substances minérales.

Document 1

Dès lors, l’ANAIM s’engageait à effectuer des paiements réguliers à l’OGC qui devait percevoir une « somme forfaitaire » équivalent à 60% des prestations de service rendu.

« C’est sur cette base que le contrat a été signé. L’OGC devait être rétribué à hauteur de 60% du service, ce qui signifiait que l’ANAIM économisait 40% », explique une source proche du dossier.

Pour respecter ses engagements, l’OGC va sous-traiter avec une compagnie qui évoluait déjà dans le domaine, Antaser, en qualité de prestataire technique seul habilité à délivrer les Bordereaux de suivi de cargaison (BSC).

Notre enquête ne nous a pas permis de savoir exactement par quel procédé, à partir de ce contrat, l’ANAIM a été autorisé à payer directement à Antaser qui s’est retrouvé avec une « commission » équivalent à 60% du montant payé par l’Agence contre 40% à OGC. Toutefois, selon nos sources, une fois ce principe acté, Antaser a régulièrement payé la quote-part prévue pour OGC à chaque paiement de l’ANAIM. C’était sous le directeur général Amadou Dieng et à l’époque l’actuel directeur général de l’OGC, Sékou Camara, assumait les fonctions de directeur général adjoint de l’Office…

Jusqu’à son départ de l’ANAIM, le directeur Dieng a pu garantir les paiements normaux  prévus dans le contrat de base, sans cumuler d’arriérés notables. Avec la nouvelle direction installée en janvier 2013, les choses coincent et l’ANAIM empile des retards de paiement jusqu’à la rupture unilatérale du contrat liant l’OGC et Antaser. Un nouveau changement va intervenir à la tête de l’ANAIM en Mai 2014 avec la nomination de Lamine Cissé comme directeur général.

Les documents que nous avons vus indiquent que le montant total des arriérés s’élevait à environ 1,5 million de dollars USD (exactement 1511068 USD) avant qu’Antaser n’opte pour la méthode douce en adressant une correspondance (le 31 Octobre 2016) au ministre d’Etat Ibrahima Kassory Fofana pour signaler les retards de paiements. Le montant du contrat n’a jamais été précisé car dépendant des flux de cargaisons de bauxite mais, de toute évidence, il va bien au-delà des 1,5 millions USD qui ne sont que les montants des arriérés non payés avant l’arrêt des activités d’Antaser.

En qualité de président du conseil de investissements privés, le ministre Fofana va adresser lui-même une lettre (N°00888/PRG/ME-CPI-PPP/SP/PM/PK) au ministère des mines, tutelle de l’ANAIM, pour « examiner la réclamation ». A son tour, le ministère s’adressera à l’ANAIM, déclenchant ainsi un processus qui va déboucher sur une sorte de protocole d’accord (voir document 2).

document 2

Le règlement de cette affaire d’arriérés matérialisé par le document signé de Sékou Camara, Directeur général de l’OGC et Lamine Cissé, Directeur Général de l’ANAIM, a été facilité par le conseiller à la présidence, Patrice Kourouma, qui a également apposé sa signature. Une lettre d’Antaser datée du 5 juillet 2017 lève toute équivoque par rapport à un quelconque lien de représentation entre cette compagnie belge et toute autre personne (voir document3).

scan0951

document 3

Une affaire d’arriérés de paiement

Dans le document signé le 8 mars 2017, il est clairement stipulé que compte tenu des difficultés de trésorerie de l’ANAIM, les paiements en retard prévus au compte de l’OGC (via le partenaire technique Antaser) seront réglés en 12 mensualités à hauteur d’environ 125000 dollars USD (exactement 125921 USD) par mois. Dans les faits, cela doit se dérouler en suivant la clé de répartition indiquée plus haut. En d’autres termes, l’OGC ne doit encaisser chaque mois que 40% du paiement fait directement à Antaser, soit 50368 USD jusqu’à épuisement total des arriérés.

Jusqu’en Mai 2017, aucun paiement de l’ANAIM dans le cadre du respect de ce « protocole » n’a été fait en faveur de l’OGC. Selon nos sources, les appétits individuels auraient ralenti la procédure ; Antaser et le conseiller à la présidence Patrice Kourouma ayant exigé par précaution que le montant soit versé dans un compte de l’OGC à la Banque centrale de la République de Guinée (BCRG).

Après moult manœuvres vaines, les responsables du blocage vont se rendre à l’évidence : il était impossible de payer autrement que dans les caisses de l’Etat guinéen. Pour la petite histoire, Mediaguinée a vu deux autres lettres indiquant que l’affaire est en voie de règlement (voir documents 4 et 5).

document 4

document 5

Plus de 4 mois après le premier paiement, l’OGC a finalement transmis un numéro de compte logé à la BCRG à la compagnie belge pour diligenter ce premier paiement à l’origine de tant de supputations. Au passage, on remarquera que la lettre d’Antaser et la réponse de l’OGC ne sont datés que du mardi 5 septembre…

Joint par Médiaguinée, le directeur général de l’OGC, Sékou Camara, a justifié le « retard » par le fait qu’il n’était pas informé du paiement de l’ANAIM. Surréaliste, mais notre devoir de journaliste est de relater ce qu’il a dit ; « c’est avant-hier (Ndlr : lundi 4 Septembre 2017) que j’ai su que le paiement avait été fait (par l’ANAIM) ». Grosse ficelle ? En tout cas des sources proches du dossier ont émis des doutes sur le sérieux de cette ligne de défense.

Il est cependant important de signaler qu’Antaser, dans son courrier, évoque des « investissements » en mettant notamment en relief, sans indiquer des montants précis, des « avances dues à la restauration du siège de l’Office, d’autres mouvements liés au bon fonctionnement de l’OGC ainsi que les avances sur les recettes ». Les vérifications ne font que commencer mais, au cas où un écart serait découvert entre le montant estimé des arriérés et la réalité des contrôles, tout porte à croire que la quote-part nette de l’OGC pourrait changer.

« Personnellement, je n’ai aucun document qui peut attester les allégations d’Antaser (au sujet des investissements). Je leur ai demandé de me les fournir si tel est le cas », a dit Camara à ce propos. En tout état de cause, cette affaire qui anime de (trop) nombreuses conversations illustre bien la nécessité d’opérer un travail en profondeur dans certains secteurs clés de l’économie guinéenne pour sécuriser les paiements dus à l’Etat.

Saliou Samb

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2 commentaires
  1. Coulibaly dit

    Encore un très bon article d’investigation de la part de ce journaliste. Il nous éclaire vraiment. Merci monsieur

  2. Mohamed Keita dit

    Un article vide de sens parce qu’on lui a pas donné les vraies informations. Sekou Camara n’a jamais collaboré avec la direction générale d’alors dans la mise en oeuvre de ce contrat. Il voulait juste dérober cet argent comme il l’a fait avec les 25 milliards qu’il a reconnu lors de la mission d’inspection. Je tiens à vous informer que les vrais acteurs de ce dossier sont au département. Allez les rencontrer pour en savoir clair. Il y a trop de contre vérité dans cet article. Merci

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