Suspense au parlement catalan puis soudain: « L’indépendance? Suspendue! »

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« L’indépendance? Suspendue! »: les mots ont résonné mardi soir un peu partout dans les couloirs bondés du parlement catalan où régnait un drôle de soulagement, après une journée de suspense, d’apartés et de rumeurs.

Tout l’après-midi, à Barcelone, le parlement avait des airs de forteresse assiégée, au milieu du grand parc de la Ciutadella (« citadelle ») fermé au public, cerné par des dizaines de véhicules de la police catalane et survolé par un hélicoptère alors que des dizaines de milliers de pro-indépendantistes avaient répondu à un nouvel appel à manifester.

A l’intérieur, une ambiance de tour de Babel agitée: au moins 358 journalistes étrangers avaient accouru, aimantés par la possibilité d’une « DUI »: « déclaration unilatérale d’indépendance » aux effets immédiats et incalculables.

A 17H00, le président indépendantiste catalan, Carles Puigdemont – épais cheveux bruns et costume sombre – monte lentement les escaliers, sous les crépitements des flashes.

En souvenir d’un jour « historique », des journalistes catalanes rieuses se font des selfies. Au même moment à Madrid, le numéro deux du gouvernement espagnol Soraya Saenz de Santamaria affirme que l’Espagne vit « l’un des moments les plus importants et difficiles » de son histoire récente.

– Suspense, rumeurs, réunions subites –

Soudain, le parlement est saisi par l’émoi: la séance plénière de 18H00 est reportée d’une heure.

Une rumeur enfle – une vidéo-conférence aurait eu lieu entre Carles Puigdemont et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker – que Bruxelles dément aussitôt.

Quatre députés du petit parti d’extrême gauche indépendantiste CUP sortent, l’air fâché, d’une réunion avec la coalition séparatiste « Ensemble pour le oui ». « Le matin, ils étaient satisfaits et à la dernière minute, ils ont voulu des changements » dans le discours de Puigdemont, assure une source parlementaire.

Vers 19H00, la sonnerie du début de séance plénière résonne enfin. L’allocution tant attendue de Carles Puigdemont commence.

Indépendantiste de toujours, l’ancien journaliste de 54 ans a été porté en janvier 2016 à la présidence de sa région et n’a encore jamais dévié de sa « feuille de route »: conduire les 7,5 millions de Catalans aux portes de l’indépendance au plus tard en 2017.

Dans le silence concentré des 135 députés – dont 72 séparatistes – il lâche quelques mots apaisants sur « la nécessité impérieuse d’un abaissement de la tension ». Avant d’annoncer que le gouvernement catalan et lui-même « proposent que le parlement (catalan) suspende les effets de la déclaration d’indépendance » pour laisser le temps au dialogue.

La formule est alambiquée et la tension semble soudain baisser d’un cran. Brésiliens ou Japonais, les journalistes étrangers doutent d’avoir compris.

– Une signature entre séparatistes –

« En fait, la DUI – qui aurait été une folie – a été suspendue pour dialoguer », décode une journaliste espagnole de la radio Ser, Milagros Perez Oliva.

« Beaucoup ici au parlement ressentent un soulagement: pour le moment, on évite le choc », dit-elle à l’AFP, sûre que « l’Etat espagnol préparait une réponse très dure, de suspension de l’autonomie ou d’incarcération de Puigdemont ».

Pour la chef de l’opposition au parlement, Inès Arrimadas, du parti libéral anti-indépendantiste Ciudadanos, une déclaration d’indépendance même différée « reste un coup d’Etat contre le bon sens ».

« Vous êtes seul au niveau international, il n’y a pas un seul leader européen qui vous soutienne », lance-t-elle à M. Puigdemont, qui ne se départit pas de son sourire.

Puis le dirigeant socialiste catalan Miquel Iceta, dit et répète – en espagnol, anglais, français – qu' »une minorité ne peut pas s’imposer à une majorité ». Il rejette les résultats du « référendum » d’autodétermation interdit du 1er octobre – 90,18% » de oui à l’indépendance avec 43% de participation – auquel ont participé deux millions d’électeurs sur 5,3 millions recensés, selon les autorités catalanes.

La séance s’achève vers 21H00, mais soudain, tout le monde est nouveau décontenancé. Qu’est donc parti faire M. Puigdemont dans son bureau avec ses alliés?

La réponse tombe: « la déclaration d’indépendance déjà suspendue, nous la signons. Mais elle ne s’appliquera pas automatiquement, elle est suspendue pendant des semaines », dit à l’AFP une source parlementaire de « Ensemble pour le oui ».

C’est donc ça: une déclaration « signée au cas où il faudrait l’appliquer ».

Les députés indépendantistes montent un à un apposer leur paraphe.

Quand la phrase-clef est finalement prononcée par une élue CUP – « Nous constituons la République catalane comme Etat indépendant et souverain » – certains s’étreignent. Tous applaudissent. Entre eux.

AFP

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