Abdourahmane Baldé aux jeunes de Guinée : ‘’si vous avez des cailloux, déposez-les ! Refusez la violence’’

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Depuis plusieurs semaines déjà, le débat sur le changement de Constitution polarise toute l’actualité en Guinée. Les réactions fusent de partout pour saluer ou dénoncer le projet. Parfois sur fond de violences verbales et physiques. Face à cet état de fait, le Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC) a appelé la semaine dernière à des manifestations sur toute l’étendue du territoire national contre une nouvelle Constitution. Des manifestations qui ont fait une dizaine de morts, des blessés et de nombreuses arrestations. Rencontré mardi 22 octobre, Abdourahmane Baldé, président du Parlement des Jeunes leaders de la Société Civile guinéenne est monté au créneau pour appeler les acteurs politique au dialogue. Il a invité les jeunes à la retenue et à refuser la manipulation. Car, dit-il, il est question d’un conflit générationnel. Interview…

Mediaguinee : l’actualité sociopolitique de la Guinée ces derniers temps est agitée. Quel est votre constat de la situation ?

Nous sommes tristes et nous présentons nos sincères condoléances aux parents des victimes de ces violences qui ont été sans doute exercées sur des Guinéens innocents, mais souhaiter également prompt rétablissement aux blessés hospitalisés dans les hôpitaux et dire que nous sommes déçus de constater que jusqu’à nos jours l’élite guinéenne n’a pas pu véritablement sortir le peuple de Guinée de ce cercle vicieux de la haine, de la violence. Parce qu’en réalité, les intérêts sont mis en avant par rapport aux Guinéennes et aux Guinéens. Et c’est pourquoi nous pensons que ce n’est pas un début, tous les chefs d’Etat qui sont arrivés en Guinée ont été à un moment donné devant des situations difficiles à gérer. Nous au Parlement des Jeunes Leaders de la Société Civile, vous savez que la société civile, ce sont des organisations de veille, d’alerte et de force de propositions, ce ne sont pas des instruments de violences dans toutes les Républiques, avions dit vraiment que les Guinéens doivent s’arrêter, évaluer leur passé, poser un diagnostic clair et voir ce qui nous a fait échouer. Qu’est-ce que nous avons posé comme actes qui ont marché et camper l’avenir, parce qu’en l’absence d’une vision il n’y aura pas de développement. Aujourd’hui encore, ce sont des acteurs politiques divisés qui ne se comprennent pas qui ont invité les citoyens dans la rue, lesquels citoyens ont subi la violence. Ce que nous pouvons encore réitérer c’est l’appel au dialogue pour que les uns et les autres essaient de se retrouver autour de la table, pour pouvoir discuter, parce qu’en réalité la démocratie est une discussion, la démocratie est un échange d’idées, une diversité d’opinions, la démocratie c’est établir sur la tolérance entre les citoyens et les citoyennes, la démocratie aussi c’est un engagement, ce sont des libertés. Depuis 1958 jusqu’à nos jours, nous avons eu une culture de la violence que certains même appellent la culture de la haine, jusqu’aujourd’hui nous sommes nés sur des richesses qui dorment comme le disent les autres mais toujours nous avons des difficultés. Alors il faut s’interroger : est-ce que c’était Sékou Touré ? Il paraît que nous avons beaucoup critiqué le président Sékou Touré, il est décédé il y a de cela plus d’une trentaine d’années. Et jusqu’à nos jours, les Guinéens sont encore en train de vivre les mêmes difficultés. Est-ce que c’était le président Lansana Conté ? Le président Lansana Conté est arrivé au pouvoir, il a fait ce qu’il a pu, les Guinéens ont estimé qu’il avait un problème, qu’il était lui-même le problème avec son système, jusqu’à nos jours bien qu’il soit encore dans sa tombe, les Guinéens n’ont pas encore eu de solution. Le président Dadis est arrivé, les gens ont dit non c’est un putschiste, non c’est un militaire qui a pris le pouvoir comme on le sait, qui a succédé au président Lansana Conté qui est un militaire, un officier de l’armée. Lorsque les Guinéens ont dit non, ça aussi c’est quelque chose qui ne va pas, l’armée doit libérer le pouvoir. Le président Dadis a fait ce qu’il a pu tout comme le président Lansana Conté son prédécesseur mais à la fin lui aussi il a connu ce qu’il a connu et nous avons tous estimé qu’il était le problème. Et il y a eu des opposants qui ont appelé à des manifestations le 28 septembre (2009). Nous avons eu au moins 150 morts. Nous estimons que justice mérite d’être rendue, mais le président Dadis n’est plus au pouvoir. Ensuite, Sékouba Konaté au pouvoir pour assurer la transition, les gens ont estimé que lui aussi il avait des problèmes. Il n’est plus là, maintenant c’est le Professeur Alpha Condé. Le Guinéen estime qu’il y a encore des problèmes. L’une des choses que nous n’avons pas encore pu gérer c’est la violence. Il y a aussi la question de la justice. Il n’y aura pas de paix lorsque des gens supposés discuter posent des conditions pour aller au dialogue, parce que lorsque vous posez des conditions pour aller au dialogue, vous voulez que ces conditions soient réunies avant d’aller au dialogue. Dans ce cas, pour poser des conditions à l’avance. Les présidents eux aussi j’ai comme l’impression que tous ceux qui sont arrivés ont voulu utiliser le même système pour gouverner. Alors ça les a aussi conduits là où ils sont. En ce qui concerne la situation sociopolitique du pays, nous sommes en situation de crise, les Guinéens et les Guinéennes ont peur parce que tout simplement les leaders politiques n’ont pas pu s’accepter, ils se comprennent et ils s’acceptent à la seule condition qu’ils partagent les mêmes intérêts. Nous avons connu des moments où il y a eu des questions à l’assemblée nationale qui n’ont même pas fait l’objet de débat, quand il s’agissait de fixer le salaire des députés à l’assemblée nationale ça n’a pas créé de discussion, on a eu zéro mort, ils se sont entendus et ils ont voté les lois qui les arrangent. Mais quand les jeunes sont allés pour dire qu’ils luttaient contre le loyer cher, cette proposition est en souffrance, elle n’a pas bénéficié d’un véritable appui des élus à l’assemblée nationale pour qu’une fois il y ait un cadre juridique qui puisse encadrer les loyers, parce que les populations sont en train de souffrir. Aujourd’hui, vous avez des logements à 2 millions 500 mille francs guinéens, 3 millions, 4 millions, jusqu’à 2500 euros, c’est autour de 25 millions un appartement le mois, à Kipé c’est 4 millions, donc les populations vivent dans une pauvreté extraordinaire. A chaque fois qu’un président arrive c’est lui le problème. Nous avons une ancienne gouvernance, des anciens gouvernants qui sont devenus de nouveaux opposants, des anciens opposants sont devenus les nouveaux dirigeants. Les anciens gouvernants avaient soutenu un référendum en 2001. Maintenant, ils veulent refuser en 2019 un referendum. Les anciens opposants qui s’étaient opposés à un référendum en 2001 sont aujourd’hui promoteurs d’un référendum Constitutionnel. Alors vous comprenez bien que nous sommes dans un cercle vicieux. Est-ce qu’il sera facile pour les anciens gouvernants qui avaient fait la promotion d’un référendum en 2001 de s’opposer à un référendum en 2019 ? Ils deviennent la main d’œuvre du référendum en 2001 et en même temps les opposants au référendum en 2019. Ça c’est une question. Est-ce que les anciens opposants qui s’opposent à un référendum en 2001 veulent devenir la nouvelle main d’œuvre pour un référendum en 2019 ? Donc dans les deux cas, la société est devant une situation compliquée. C’est une situation compliquée mais la seule et unique solution face à cette situation c’est l’arrêt des violences, que les uns et les autres se retrouvent autour de la table de discussion pour qu’ils puissent s’entendre. Ils doivent discuter, la démocratie est une discussion, ils doivent débattre. On doit s’abstenir de faire usage de nos émotions et muscles, surtout il ne faut pas s’appesantir sur les stratégies ethnico-ethniques. Il faut faire très attention. Les Guinéens partagent les mêmes réalités, partagent les mêmes souffrances, les mêmes expériences. S’il y a un bonheur, les Guinéens le partagent ensemble. Je souhaiterais que la majorité de la population soit épargnée et que la paix règne dans la cité. Cette paix ne peut s’appuyer que sur la justice, que le gouvernement accepte d’établir une justice dans ce pays pour l’intérêt de chacun.

Mediaguinee : Vous avez appris la condamnation des acteurs de la société civile. Qu’est-ce que cela vous dit ?

J’ai reçu l’information que les acteurs de la société civile qui ont été arrêtés, condamnés. Je vais dire ceci au peuple de Guinée, il n’y aura pas de héros demain lorsque nous ignorons la situation de nos héros d’hier aujourd’hui. Nous oublions vite, la construction d’un héros se fait par l’inspiration. Par l’exemple, quand j’ai suivi la déclaration du FNDC qui a invité à la manifestation, j’ai pris langue avec certains d’entre eux pour chercher à mieux comprendre ces questions. Mais je crois que c’est un peu tard, aujourd’hui ils sont condamnés. Nous avons lancé un appel au gouvernement quand ils ont été arrêtés, à l’Etat notamment d’accepter de les libérer au nom de l’apaisement. Mais vous comprenez que le président de la République en tant que premier magistrat de la République peut bien estimer que ça c’est une affaire judiciaire à laquelle il ne doit pas être mêlé et estimé qu’au nom de la séparation des pouvoirs il n’a pas grand-chose à faire en s’immisçant dans la procédure. A un moment donné, il aura une possibilité de régler la situation, voilà moi ma position. Je crois que le président de la République peut toujours penser à leur situation, nous l’invitons au nom de la paix, au nom de l’apaisement dans notre pays, nous souhaitons qu’il accepte de libérer nos camarades de la société civile qui ont été arrêtés. C’est une réalité qui nous a vraiment touchée, nous pensons que l’Etat doit donner la garantie et l’assurance quand il s’agit des libertés fondamentales en démocratie, parce que la démocratie institutionalise la liberté, c’est ce qui est plus intéressant. Encore une fois, il me revient de lancer un appel au chef de l’Etat pour qu’il puisse accepter de trouver une solution pour que nos camarades soient libérés.

Mediaguinee : Vous êtes un leader qui a représenté la Guinée dans beaucoup de pays. Quel est selon vous le rôle de la jeunesse dans une démocratie ?

D’abord la démocratie est très belle. La démocratie a été embrassée par plusieurs pays à travers le monde et c’est un système politique qui a dû faire un long et chemin. Et pour mieux la cerner, il faut chercher. La démocratie encore une fois est une discussion, c’est un engagement, c’est à la fois un leadership transformationnel des visionnaires. Il faut que cette jeunesse agisse avec une méthode. L’énergie de la démocratie, ce sont des citoyens informés, instruits, bien éduqués et amoureux de leur patrie dans un pays souverain, c’est cela le sens de la démocratie. Lorsque les jeunes ne s’informent pas, lorsque l’école est déjà fermée ou même quand elle est ouverte, vous savez bien la qualité du système éducatif, je pense qu’en l’absence d’une école, une véritable école qui offre les qualités de formation adéquate adaptées aux besoins du marché, il n’y aura pas d’école unité d’abord de production d’hommes et de femmes compétents, mais il n’y aura pas également d’école unité de production d’un citoyen. Un citoyen est celui-là qui sait quels sont ses droits et qui les réclame, qui connait ses devoirs et se limitent et qui les exercent dans une société. Pour que la jeunesse joue un rôle dans la démocratie, il faut qu’elle soit compétente, la volonté ne suffit pas. Tous les Guinéens, toutes les Guinéennes peuvent voir la volonté de développer notre pays, si nous manquons de compétences qui puissent nous aider à matérialiser cette volonté, la Guinée n’ira pas de l’avant. Donc il faut les compétences. Des citoyens informés, formés, sensibilisés, instruits, disposant de réelles capacités constituent la véritable énergie de la démocratie. Tant que nous nous limitons aux discours, nous ne travaillons pas, nous ne pouvons pas développer notre pays. La jeunesse a un rôle fondamental mais si l’école n’est pas reformée, si le système éducatif ne forme pas, ne donne pas la qualité, il est clair que nous risquons de continuer à avoir des gens qui n’attendront que l’Etat, à avoir des jeunes qui veulent vraiment contribuer au développement de notre pays mais qui n’auront pas en ce moment-là suffisamment de compétences pour pouvoir matérialiser leurs rêves. Aujourd’hui, on a des jeunes qui sont majoritairement en situation de chômage et nous avons la plupart des jeunes qui ont des difficultés pour aller dans l’entreprenariat et l’entreprenariat suppose l’accès au crédit et c’est extrêmement compliqué. Maintenant, est-ce que cette jeunesse qui est en situation de chômage a intérêt à aller tomber dans une culture de violence ? Non ! La jeunesse guinéenne dans sa majorité est pauvre, alors si elle se laisse emporter par des leaders politiques qui sont vachement riches, parce que moi, au lieu de m’inscrire dans la logique de la communauté, je préfère m’inscrire dans la logique du conflit générationnel. Nous avons un problème mais le véritable problème c’est que les jeunes ne comprennent pas qu’ils ont en face des gens extrêmement riches qui s’entendent vraiment, je ne veux pas nommer les gens mais et les leaders de l’opposition et ceux de la mouvance s’entendent très bien avec les opérateurs économiques du pays. Ceux qui sont riches sont ensemble, ceux qui sont pauvres sont ensemble. Alors ceux qui sont pauvres ne sont en paix que lorsque ceux qui sont riches s’entendent sur leurs intérêts. Le jour où ils ne s’entendent plus sur leurs intérêts, ce jour-là c’est la violence qui est exercée sur les populations pauvres. La main d’œuvre du développement d’un pays c’est une jeunesse bien formée, bien instruite, capable, qui dispose des compétences à la fois nationale et internationales pour faire face aux défis à relever. C’est pourquoi je vais vous dire, vous avez les tables de nos mamans aux marchés de Koloma, Matoto, Enco5, des femmes qui se réveillent à 6 heures, des fois à 4 heures du matin, qui partent chercher des condiments qu’elles revendent, ce sont ces femmes qui nourrissent pratiquement la population guinéenne. Ce sont les enfants de ces pauvres dames qui sont en train d’être tués. Vous n’avez aucun jeune ici, fils d’un richissime du pays qu’il soit de la mouvance, de l’opposition ou du patronat qui est tué, ce sont les enfants des pauvres. Et c’est pourquoi il faut lancer un appel à l’endroit de ces jeunes. Qu’est-ce que vous voulez ? Moi je l’ai expliqué ici, on ne peut pas continuer à être des preneurs éternels de sacs, ouvrons nos yeux, comprenons les réalités de notre pays. Une jeunesse qui ne peut pas faire un deal, une jeunesse qui ne peut pas défendre ses intérêts. Les gens ne manifestent pas pour qu’il y ait un système éducatif de qualité. On ferme les écoles, on empêche nos jeunes d’aller à l’école et on les met dans la rue. Ceux qui sont au pouvoir sont très riches, ceux qui sont dans l’opposition sont très riches, quand les gens tombent on se limitent à aller dans les familles pour présenter les condoléances. L’élite guinéenne a perdu son patriotisme, il faut qu’on se le dise. Ce sont des gens qui ont des enfants à l’extérieur. Aujourd’hui, la jeunesse doit se retrouver pour défendre ses intérêts. Dites-moi quand on se battait en 2001, il y avait combien de jeunes à l’assemblée nationale d’alors ? Quand on se battait en 2001, il y avait combien de jeunes dans le gouvernement ? Aujourd’hui, nous avons combien de jeunes dans le gouvernement ? Nous avons combien de jeunes à l’assemblée nationale ? Même les leaders des partis politiques refusent de procéder à une véritable promotion des jeunes. Quand les jeunes n’osent pas diriger, ils vont oser prendre les balles. Quand les jeunes n’osent pas diriger, ils vont laisser leurs petit-frères aller dans la rue pour se faire tuer. Nous avons des enfants de moins de 14 ans qui ont été tués, on a versé leur sang parce que simplement ce des jeunes qui n’avaient pas quoi manger, qui ne revendiquent pas un système éducatif de qualité, qui n’identifient pas leurs véritables problèmes et cherchent à les régler. Ça veut dire que ceux qui nous ont frappés hier, vont être nos amis aujourd’hui, ils vont nous pousser…. Je ne veux pas nommer les gens dans cette interview, mais c’est décevant ce qui se passe dans notre pays. Gandhi l’avait dit : « la pauvreté est la pire forme de violence », c’est déjà une violence exercée sur les jeunes, mais à côté de ça vous avez des gens qui ont vendu leur carte d’électeur à 20 000 francs guinéens. Arrêtez ! Quand vous réclamez vos droits ici en tant que jeune on vous dit que vous êtes pressé, qu’il faut attendre.

Obama avait dit que « l’Afrique a besoin du sang neuf et des idées nouvelles ». Ce sont les jeunes qui vont bâtir la Guinée. C’est ça c’est notre rôle. Ce n’est pas en versant notre sang dans les rues pour des gens qui vont quitter et revenir dans le gouvernement ou alors des gens qui vont mal gouverner et qui après quand ils ne sont plus ministres ou présidents, qui vont venir nous sortir dans les cases de nos pauvres parents, qui vont nous reverser dans la rue et nous faire tuer. Moi je suis pour une jeunesse que vous appelez « consciente », mais une jeunesse qui veut s’habiller, étudier, qui a besoin de défendre ses droits mais pas une jeunesse qui va mourir pour des gens qui l’ont sacrifiée. La jeunesse guinéenne doit encore une fois tendre la main et demander ses intérêts, réclamer ses intérêts. Nous avons des jeunes filles à accompagner, nous avons des jeunes garçons à accompagner. Le premier élément d’accompagnement c’est l’éduction, c’est la formation. Est-ce que vous avez une seule fois entendu en Guinée que les leaders politiques du pays ne sont pas d’accord sur la formation qui est donnée aux enfants de Guinée et par conséquent on invite les gens à sortir dans la rue ? La seule chose qui a tué les gens dans ce pays, c’est un problème d’intérêt. Que cette jeunesse revendique ses intérêts. Moi demain si vous avez un jeune Kourouma, un jeune Condé qui veut être président de la République de Guinée, qui veut inviter les jeunes à manifester pour cela, je serai d’accord, tant que c’est pacifique. Un ancien président de la France l’a dit : « la guerre tue longtemps après sa fin », il faut éviter la guerre. Il faut que la jeunesse refuse absolument d’être une main d’œuvre de la guerre. Ça c’est le premier rôle que la jeunesse doit faire dans une démocratie. Ensuite, il faut que la jeunesse accepte de s’instruire, de s’épanouir, de s’informer pour jouer son rôle dans la construction d’un Etat démocratique en Guinée. On n’est jamais libre quand on n’est pas informé, on n’est jamais libre quand on subit les lobbies. La société civile est un lobby, la politique c’est un lobby. La jeunesse doit prendre les institutions de la République en otage dans l’intérêt supérieur de la Nation. Ce sont les jeunes qui sortent, manifestent et qui meurent. Refusez de mourir en l’absence d’une véritable cause. Et tout cause qui est éloignée de la cause des jeunes n’est pas une cause suffisante qui doit faire que des jeunes vont mourir. Nous sommes en train de perdre nos vies inutilement pour des hommes politiques que je ne qualifie pas « d’égoïstes », mais bien informés qui savent ce qui doit être fait. Qui peut me dire que les leaders politiques ne connaissent pas ce qu’il fallait pour la Guinée ? Ils connaissent bien. Mais quand les jeunes sont pauvres, quand ils savent que ce sont des jeunes qui tendent la main, on ne peut pas vivre digne en tendant la main aux autres. Faisons la paix. Et ceux qui disent OUI à une nouvelle Constitution et ceux qui disent NON à une nouvelle Constitution, en majorité ils sont tous des jeunes. Personne n’a vu un texte de lois, personne. Alors dites-moi qu’est-ce qui est écrit dans cette Constitution que vous appelez nouvelle, que vous soutenez ? Qu’est-ce qui est écrit en faveur des jeunes ? Dites-nous qu’est-ce qui est écrit là-dedans en faveur des jeunes ? Moi je n’ai pas vu. On m’a interviewé plus de mille fois pour me demander mon avis sur un texte que je n’ai pas vu. Mais demandez-moi ce qui est dans ce document (il brandit un livre) que les Américains ont bien voulu me donner : ‘’Dans la tête des grands leaders’’. Je peux me prononcer parce que ça au moins je l’ai vu, je l’ai lu. Mais je n’ai pas vu un texte qu’on appelle nouvelle Constitution alors que des gens sont en train de mourir. Quel est l’avantage qu’on a proposé, consacré dans cette nouvelle Constitution. La jeunesse guinéenne doit sortir du cercle vicieux pour se retrouver dans un cercle vertueux, nous devons refuser de mourir pour rien. Nous devons nous battre pour nos intérêts. On va vous dire c’est le patriotisme. Oui mais se battre pour les intérêts de la jeunesse, ça ce n’est pas du patriotisme ? Ne faut pas mettre tes enfants dans une salle climatisée, regardant la télé pour voir des enfants des innocents mourir, des enfants pauvres mourir dans les rues de Conakry, c’est ce qu’on a toujours fait, il faut sortir de l’égoïsme. Ce sont les gens venus des villages qui sont en train de mourir, des gens qui ont du mal à s’en sortir économiquement qui sont en train de mourir, qui n’ont même pas de relations auprès des gouvernants. Dites-moi quel est ce parti politique de la mouvance ou de l’opposition qui a fait la promotion des jeunes ici ? En Guinée, il y a des individus qui ont plus de 45 ans qui se disent jeunes. Ce n’est pas cela la réalité. Un jeune qui a plus de 36 ans est jeune pour lui seul. Et puis il y a des gens qui ne m’ont pas appelé depuis 3 ans qui commencent à m’appeler pour me dire d’agir, on veut manipuler la jeunesse. Il faut qu’on se dise la vérité, quand les intérêts sont sécurisés, chacun porte son grand boubou, on porte des bazins, on monte dans des grosses cylindrées et on va dans des salles climatisées alors que les jeunes ne trouvent même pas du thé. Dans la galère ici, la plupart des jeunes n’ont même pas 1000 francs, c’est quand ça ne va pas là-bas, les intérêts sont menacés, on vient vers nous pour nous dire qu’on doit aller manifester. Parfois, alors l’Etat lui-même. Le professeur Alpha Condé c’est un socialiste, c’est lui qui est censé protéger les jeunes de Guinée. J’en appelle vraiment au président de la République, je voudrais qu’il accepte de nous protéger, je voudrais qu’il accepte de nous défendre, je voudrais qu’il accepte de promouvoir les intérêts des jeunes. Je parle jeune, je ne parle ni soussou, ni forestier, ni malinké, ni peulh, je parle jeune. Les jeunes qui s’en sortent difficilement alors qu’aujourd’hui le prix d’un terrain entre ici et Kindia varie entre 50 millions et un milliard, comment les jeunes peuvent travailler pour obtenir 50 millions ? Les jeunes de Guinée doivent s’arrêter. Déposez les cailloux si vous en avez dans vos mains, déposez, refusez la violence. Il y a des jeunes aussi dans l’armée qui galère, on vous donne des tenues, on vous donne des armes pour que vous sortiez. Ne faites pas violence aux jeunes, déposez les armes s’il y en a. Le problème, il est orienté vers les jeunes. Les gens ne vont pas en congé à Labé, ils ne vont pas en congé à Yomou, ils ne vont pas en congé à Kankan, ils ne vont pas en congé à N’Zérékoré pour connaitre les réalités de nos parents là-bas. La majorité des jeunes qu’on tue ici ou tous les jeunes qu’on a tués d’ailleurs ici ce sont les enfants des pauvres. Ne faut pas orienter votre ethnocentrisme vers nous, on n’a rien à voir avec vos problèmes d’ethnocentrisme. On n’a absolument rien à voir, je suis informé de tout ce qui se passe pratiquement. Ça n’a rien à voir, vous êtes partis là-bas, vous avez composé ensemble, vous vous êtes retrouvés à l’assemblée nationale. Comment pouvez-vous comprendre que tous les partis politiques n’aient pas le courage de faire la promotion d’un seul jeune à l’assemblée nationale à part Kassory qui a envoyé Habib à l’assemblée nationale ? Quand j’ai parlé, quelqu’un m’a dit qu’il y a Mouctar Diallo dans le gouvernement… Mouctar Diallo est notre grand-frère je le respecte mais il a plus de 36 ans. Il faut qu’on sorte de cette démagogie. Il ne nous représente pas dans un gouvernement. Nous, notre place dans ce pays c’est dans les tombes. La communauté internationale, il faut que vous soyez informée, la place des jeunes qui constitue la majorité de la population guinéenne c’est dans les tombes chez nous, dans les cimetières (…), il faut nous protéger, nous ne voulons pas de casques bleus dans notre pays, il faut nous éviter la guerre en Guinée, il faut maintenir la paix dans ce pays et pour cela tout ce qu’ils peuvent faire c’est la justice et la formation. Si nous avons un appareil judiciaire efficace, nous avons un système éducatif efficace, nous allons acquérir les compétences, nous allons nous informer, nous allons nous instruire et nous allons construire la démocratie dans notre pays.

Mediaguinee : Nous voilà à la fin de cette interview. Y a-t-il un sujet qui n’a pas été abordé et sur lequel vous aimeriez revenir ?

En dépit de toutes les tentatives pour nous diviser, en dépit de tous les jeux pour nous opposer, rien ne doit menacer notre unité, rien ne doit nous séparer car unis nous donnerons l’espérance à la Guinée, nous gagnerons. Les Guinéennes et les Guinéens doivent refuser la violence, doivent savourer leur liberté mais doivent protéger ces jeunes. Je vous remercie

Réalisée par Maciré Camara

+224 628 112 098

 

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