INTERVIEW. « La femme doit cesser de paraître mais être », dixit Rabiatou Sérah Diallo

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Dans le cadre de la célébration de la journée internationale de la femme, nous avons rencontré Mme Rabiatou Sérah Diallo, Présidente du Conseil Economique et Social (CES), pour débattre sur l’avancée des femmes sur le plan professionnel, de la violence et de la discrimination dont elles subissent dans la vie active.
MEDIAGUINEE : Les femmes sont à l’honneur chaque 8 mars. Mais au delà des discours, pensez-vous que leurs attentes sont comblées ?
Rabiatou Sérah Diallo : je pense que nous avons fait beaucoup de choses mais il reste encore beaucoup à faire, les attentes dont vous parler ne sont pas du tout comblées parce que notre souhait est que les femmes cessent de paraître mais plus tôt être, qu’on fasse confiance en elles et qu’on leur donnent beaucoup plus de responsabilité mais aussi qu’elles participent à la prise des décisions car toute société qui évolue sans la couche féminine est vouée à l’échec. Aujourd’hui le monde évolue et la donne change, il faudrait que l’on puisse valoriser la présence de la femme. Quand nos chefs d’antan étaient confrontés à des difficultés, ils se disaient toujours que la nuit porte conseil. En fait, c’était plutôt d’aller demander conseil à leurs épouses, le lendemain ils reviennent avec une solution adéquate. Je pense donc qu’il faut exploiter cette donne et voir qu’on ne rejette pas non plus les hommes, surtout sur le continent africain. Là, il faut s’en féliciter en Guinée car nous avons connus des femmes battantes qui n’ont jamais fait l’école à l’image de feu Hadja Mafori Bangoura. Autres valeurs de la femme guinéenne : Hadja Jeanne Martin Cissé, récemment décédée, paix à son âme. Elle a été la première femme africaine à diriger le conseil de sécurité des Nations Unies, Hadja M’Hawa Bangoura, qui a été ministre des affaires étrangères, nous avons aussi Dr Makalé Traoré, qui a été la directrice de campagne de l’actuel Président de la République. La femme n’a pas une vitesse de marche arrière elle va de l’avant. La femme n’a pas de couleur ni de religion, c’est elle qui agrandit toute une famille parce qu’elle n’a pas de race, c’est l’amour qui compte chez elle.
Si une nation exploite cette idée il n’y a pas de raison qu’elle n’arrive pas à réussir. La femme doit être un rassembleur, elle ne doit pas baisser les bras parce que les hommes ne font pas toujours cadeaux. Alors il faut lutter et être sur le terrain afin de pouvoir arracher nos droits et atteindre l’objectif visé.
Quel ressentiment avez-vous par rapport à la discrimination et aux violences faites aux femmes ?
Mon cœur grince, j’ai de la peine quand je vois des viols des enfants d’un moi même. Je me demande c’est quelle maladie ? Que dire des personnes âgées qui sont violées. Et, dans les foyers polygames, la femme qui n’a pas fait d’enfant n’est pas considérée, elle est rejetée, à travail égal elle est discriminée même si elle connaît mieux que l’homme. Il faut que les femmes cherchent à connaître leurs droits. En Guinée, la loi dit qu’une femme qui n’a pas fait d’enfant à sa part dans l’héritage ; chaque 5ans équivaut à un enfant, mais ce n’est pas toutes les femmes qui le savent c’est pourquoi des associations, des ONG, des institutions doivent s’y mettre pour motiver , sensibiliser les unes et les autres dans nos langues nationales, dans le système éducatif qu’on sache que l’union entre l’homme et la femme est une question de complémentarité. Il faudrait qu’on assume cela, pour qu’on confie des responsabilités aux femmes il faut aussi qu’elles acceptent de s’y mettre, en se formant davantage.
Parlant de l’excision je suis contre cette pratique parce qu’elle a des conséquences néfastes sur l’évolution physiologique de la jeune fille qui est appelée à être maman. C’est pour cela qu’il faut rendre hommage à nos mamans qui ont souffert et qui continuent à souffrir et les soutenir dans ce qu’elles font. Mais de nos jours le monde à changer, c’est à nous d’apporter ce changement sans avoir à utiliser des mots violents tout en respectant nos valeurs culturelles.
Peut-on connaître votre parcours administratif et politique ?
Je suis syndicaliste de nature, j’ai le sang syndical dans mes veines parce que je pense que c’est l’organisation la plus organisée, la plus réfléchie où on défend les intérêts des gens. Parce que, je n’aime pas l’injustice ; ça n’a pas été facile pour moi, j’ai été la première femme à être secrétaire générale de la CNTG en 2000 avec le soutien des femmes qui ont compris qu’une femme pouvait être secrétaire générale de cette centrale, la plus représentative et la plus vieille. J’en suis fière aujourd’hui parce que j’ai laissé des traces et j’ai démontré que la femme est capable de diriger. Il fallait penser très tôt à mettre une femme au niveau de la centrale qui a porté avec l’appui des autres afin d’amener une démocratie réelle. J’ai fait trois mandats au conseil d’administration du BIT. J’ai beaucoup plus œuvré dans le mouvement syndical qui m’a propulsé à la tête du Conseil National de la Transition (CNT), une première qu’une femme arrivait à ce niveau de responsabilité pour légiférer. Là, nous avons pu rédiger, améliorer les lois et adopter d’autres nous conduisant aux élections présidentielles et législatives. Je pense donc que la femme a toujours sa place au service de la nation. Et Dieu aime celui qui travail, il faut prendre toujours le monde du bon côté. Je prône la solidarité des femmes, il ne faudrait pas qu’on se serve d’une pour détruire une autre, c’est la méthode des médiocres.
Quel enseignement tirez-vous de la grève suspendue du syndicat de l’éducation ?
Je vous remercie très sincèrement de m’amener cette question, j’ai écouté dans certains médias qui me condamnent et qui pensent que je ne dis plus rien et que je cherchais une fonction. Je n’ai jamais cherché une fonction, je me bats pour ouvrir la porte aux femmes parce que je sais que c’est un mérite. Je souligne que j’ai changé de casquette, je ne suis plus sur le terrain syndical. Je suis maintenant à la tête du Conseil Economique et Social qui donne son avis et recommandations à l’exécutif, et particulièrement au Chef de l’Etat et à l’Assemblée nationale. La loi 091 CTRN nous confère une mission que nous respectons. Les gens pensent que c’est d’aller dans les radios, dans la rue, se taper la poitrine pour se faire voir pour dire voilà ce que le CES et Hadja Rabi a fait hier, elle parlait aujourd’hui elle ne parle plus. Sachez que mon institution avec tous mes collaborateurs on n’a fait de notre mieux et on est très heureux, fier et nous pensons que nous sommes écoutés au niveau de l’exécutif ou au niveau du parlement, nous avons mené des démarches à l’instant pour donner notre avis et recommandations à suivre. Pour une sortie de crise, nous avons interpellé les syndicalistes, nous avons parlé avec eux, nous avons parlé avec les sages, les religieux parce que le pays ne mérite pas tout cela. Je ne dormais pas, les syndicalistes le savent ; je n’avais pas les bas croisés, nous avons participé à ramener les uns et les autres autour de la table, à s’entendre pour privilégier le dialogue à la place de la violence. Les accords sont des engagements qui sont pris de part et d’autre et chacun doit pouvoir respecter ses engagements parce que le non respect c’est ce qui amène la contradiction et la violence dans le pays. Donc nous veillons au grain à ce que l’exécutif et les autres signataires respectent les engagements pris. Il s’agit de notre Guinée, il faut résoudre les problèmes et savoir comment développer le pays.
Quel conseil avez-vous à donner aux femmes ?
Le conseil que j’ai à donner aux femmes c’est de ne pas baisser les bras, ne pas se sous estimer. J’aime un proverbe qui dit la main propre n’est pas difficile à lécher . La femme doit savoir que c’est elle qui donne la vie et le lait ; nous ne sommes pas là pour un système, nous sommes pour tout le peuple de Guinée. Le recul pour une femme leader n’est pas une faiblesse, son recul c’est pour mieux sauter et je fais vraiment confiance à la femme guinéenne.
Réalisée par Rouguiatou Bah et Djiwo Diallo

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1 commentaire
  1. soumah Mohamed lamine dit

    Bonsoir hadja rabiatou serah Diallo .ancien patron du conseil national de la transition .actuellement presidente du conseil économique et sociales .je vous soutien pour votre poste de responsabilite car vous etes une femme battante .je vous remercie car vous etes la femme qui ma marquer dans l’histoire de notre pays la guinee .bonne fete a toi et a toute les femmes du monde. Grand merci

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