Les confidences de Mansour Kaba: « en venant à Abidjan, j’ai emprunté le prix de mon billet d’avion »

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Elhadj Mohamed Mansour Kaba est un politique guinéen bien connu. Ancien ministre, l’ingénieur en Génie civil est depuis peu président du PAG-Dyama. Nous l’avons interrogé récemment à son domicile, en banlieue de Conakry.

 Mediaguinee : Parlez-nous brièvement de vos débuts…

El hadj Mohamed Mansour Kaba : Je suis El hadj Mohamed Mansour Kaba, ingénieur en Génie civil de l’Université technique de Munich et je travaille depuis 45 ans. J’ai commencé à travailler en Allemagne, pendant trois ans, et tout le reste en Côte D’Ivoire. C’est à partir de la Côte d’Ivoire que j’ai vraiment évolué sur le continent africain. Et depuis la crise ivoirienne, j’ai transféré le siège de mon bureau ici à Conakry. Je précise que je suis fondateur et directeur général d’un bureau d’études et nous faisons partie des plus grands bâtisseurs d’Afrique. Je peux le dire sans fausse note, car nous avons travaillé dans plus de 20 pays africains sur des projets gagnés sur appel d’offres international en concurrence avec les plus grands bureaux d’études du monde. Donc, je suis revenu chez moi depuis la transition en 2010. Et pendant cette transition, j’ai été ministre de la Construction, de l’Urbanisme et de l’Habitat. Et depuis la fin de la transition, je me suis installé définitivement chez moi à Conakry en Guinée.

Le peuple de Guinée vous a connu dans les années 90 à travers le parti Dyama. Aujourd’hui, nous apprenons que c’est désormais le PAG-Dyama. Qu’est-ce qui a motivé ce changement ? 

Ce changement a toute une histoire parce que nous avons créé le parti en 1992. Nous avons participé à l’élection présidentielle de 1993, aux élections législatives de 1995 et nous avons décidé, à partir de 1998 qu’il ne servait à rien de participer aux élections organisées sous le régime du Général Lansana Conté. Donc, lors des présidentielles de 1998, nous nous sommes abstenu. Et c’est là où le Pr Alpha Condé a eu des problèmes avec la participation du RPG à ces élections. Certains ont dit, ‘’mais, Mansour, tu es un génie. Tu savais qu’il y a des problèmes ou quoi ?’’ J’ai dit à ceux-ci que je ne savais pas qu’il y avait des problèmes. Mais je savais qu’il ne servait à rien de dépenser de l’argent pour ces élections parce qu’il (Général Conté) allait toujours gagner. Alors, Pr Alpha Condé a été emprisonné. Et dès qu’il a été emprisonné, j’ai été le premier leader politique guinéen à organiser une conférence de presse et à dire que tout ce qu’on dit sur Alpha Condé est faux. J’ai lancé un appel au président Lansana Conté pour qu’il le nomme comme Premier ministre d’un gouvernement d’union nationale de transition. Ça c’était en janvier 1999 et Alpha Condé était déjà en prison. Et lorsque le temps passait, qu’on a vu que Madeleine Albright, la Secrétaire d’Etat des Etats-Unis était venue voir le Général Lansana Conté mais elle n’avait pas réussi à libérer Alpha Condé. Ensuite, le président Jacques Chirac de France est venu pour l’inauguration du barrage Garafiri. Lui aussi a tout fait pour faire libérer Alpha Condé, il n’a pas pu. Alors, nos parents, les Malinkés, ont commencé à dire si ce n’est pas Alpha Condé, c’est Mansour Kaba. C’est en ce moment que j’ai dit non. Moi, je ne peux pas profiter de l’emprisonnement d’Alpha Condé pour prendre sa place à la tête des Malinkés. Et c’est là où j’ai lancé le mot d’ordre ‘’Alpha, c’est Mansour, Mansour, c’est Alpha.’’ Aucun autre leader ne s’est identifié à un prisonnier politique ici. Je suis le seul à l’avoir fait avec le Pr Alpha Condé. C’est en ce moment que, du côté du pouvoir, on m’a informé que comme je dis que Alpha c’est Mansour et Mansour c’est Alpha, je vais rejoindre Alpha Condé en prison. Et c’est le grand frère du Général Lansana Conté, le vieux Christian qui m’a envoyé quelqu’un pour me le dire. Connaissant cela, j’ai quitté la Guinée pour aller en exil, en me disant que tant que le Général Lansana Conté est au pouvoir, je n’y reviendrai pas. Alpha Condé a été libéré quand j’étais en exil. Et après cette libération, les membres de la direction du parti Dyama qui étaient là, à savoir feu Dr Baba Nabé, Doubany Keita et d’autres sont venus saluer Alpha Condé, qui a dit quelque chose qu’on ne peut pas oublier. Il dit que même si le prix de son emprisonnement était l’entente entre le RPG et le parti Dyama qu’il n’a aucun regret pour son emprisonnement. Ces propos étaient forts pour moi. Et après ça, j’ai dit même si Alpha Condé me gifle, ça ne me dira rien parce qu’il sait qui je suis. L’histoire qui est derrière ça, c’est que depuis 30 ans, Alpha Condé a tout fait pour que je sois avec lui mais j’ai toujours refusé. Et je ne suis venu à son appel que lorsqu’il était en prison. C’est ce qui est derrière l’entente entre le RPG et le parti DJAMA. C’est après cela et pendant qu’il était en prison que le président de notre section de France, Abdoulaye Bayo et Hadja Nantou Chérif ont négocié à Paris. A la fin des négociations, Nantou Chérif et moi, nous avons signé un accord de coopération entre le RPG et le parti Dyama. Hadja Nantou a envoyé ce document ici à Conakry, Dr Mohamed Diané est allé le présenter à Alpha Condé en prison. Il (Alpha Condé) l’a lu et il a ordonné Dr Diané de le signer. C’est ainsi que Diané a signé ledit document pour le RPG et Doubany Keita l’a signé pour le parti Dyama. C’est depuis lors que nous sommes en entente cordiale avec le RPG. La transition est venue. Après cela et lorsque la transition est venue, moi j’étais avec le RPG naturellement. Nous étions deux à enfreindre les règles de neutralité des membres du gouvernement de la transition. Mouctar Diallo des NFD a fait campagne pour Cellou et moi j’ai fait campagne pour Alpha Condé. Certains avaient voulu nous exclure du gouvernement de transition parce que nous avions violé les règles de neutralité des membres du gouvernement. Après cela, Alpha Condé a été élu et après son élection, je suis venu le voir et je lui ai dit ceci : ‘’Alpha, tu es élu maintenant, on s’est battu pour que tu sois élu et tu es élu. Qu’est-ce que je peux faire pour toi ?’’ Il m’a dit ‘’Mansour ce que je souhaite, c’est que tous les partis politiques qui ont contribué à mon élection se regroupent dans une nouvelle structure (le RPG Arc-en-ciel)’’. Il m’a dit qu’il a lui-même liquidé le RPG. C’est ainsi que nous aussi, nous avons convoqué un congrès extraordinaire ici dans la salle de réunion du parti Dyama et nous avons décidé de dissoudre le parti Dyama pour adhérer au RPG Arc-en-ciel. C’est ça l’histoire de notre coopération.

Qu’est-ce qui a motivé votre départ du RPG Arc-en-ciel ?

Depuis que nous avons fait la fusion, il faut savoir que sur les 40 et quelques partis qui ont fusionné pour donner le RPG Arc-en-ciel, les deux plus importants qui avaient une représentation nationale dans toutes les régions du pays étaient le RPG et en second lieu le parti Dyama. Mais nous avons compris dès le début que nous avons fait fusion mais nous n’étions pas les bienvenus dans la fusion. Et au fil du temps, j’ai compris que la fusion était pour eux un moyen de nous museler sur la scène politique guinéenne. Parce que la concurrence qui avait prévalu de 1992 à 1998 est restée au travers de la gorge de ces gens-là. Donc, il fallait museler le parti DYAMA. Nous n’étions ni membres du bureau politique, ni membres du gouvernement, ni gouverneurs, ni préfets ou sous-préfets, pas au parlement non plus. Moi, j’ai lutté pendant 50 ans pour le pouvoir dans ce pays. On ne peut pas, à travers une fusion comme celle-ci, nous mettre au petit coin. Lorsqu’on a compris que la fusion de leur côté était vue pour nous tuer politiquement, on s’est dit non. C’est ainsi que j’ai fait le tour de mes amis ici en Guinée, en Côte d’Ivoire, en Allemagne, en France et un peu partout. Tous les amis contactés ont dit qu’on était en train de perdre notre temps avec la fusion avec le RPG Arc-en-ciel. C’est ainsi que nous avons repris notre bâton de combattant pour créer un nouveau parti qui s’appelle le Parti Panafricain de Guinée-DYAMA (PAG-DYAMA).

Il se dit que vous avez envoyé des affaires chez le président qui n’ont pas été concluantes. Qu’en dites-vous ?

Le Président de la République n’est pas un commerçant pour que nous fassions des affaires concluantes. Ce qui est complètement faux. Je n’ai pas soumis des affaires qui n’ont pas été concluantes. J’ai formulé des propositions de projet de développement du pays. Mon travail, c’est le développement du pays. J’ai développé le Gabon, l’Angola, Sao-Tomé et Principe et la Côte d’Ivoire. Sachez que tous les grands projets, sous le président Houphouët-Boigny en Côte D’Ivoire, ont été gérés par moi à travers le bureau d’études INTRADEP dont j’étais le Directeur général adjoint. Quand on dit que ce sont les Guinéens qui ont développé la Côte d’Ivoire, c’est d’abord Mansour Kaba le premier. Lorsque je suis rentré dans ce bureau, j’ai fait venir mon ami Bakary Koyo Zoumagui, qui est aujourd’hui à l’UFR. J’ai fait venir mon ami N’Faly Kourouma et Fofana Daouda Souleymane nous a rejoints. Nous étions quatre (4) ingénieurs guinéens à développer la Côte d’Ivoire dans les années 70. Il y a 40 ans de cela et quand je vois aujourd’hui que ce sont des Guinéens qui courent après les Ivoiriens, je dis c’est le monde à l’envers. Parce que ceux qui ont développé la Côte d’Ivoire sont ici, on les ignore et on va chercher les Ivoiriens pour qu’ils nous aident à faire des choses. En Côte d’Ivoire, mon tout premier projet c’était une zone à organiser par priorité pour un programme de 2750 logements. Nous avons réalisé ce projet en trois (3) ans (1973, 1974 et 1975). Depuis l’indépendance jusqu’aujourd’hui, tous les gouvernements guinéens réunis, on n’a pas réalisé 100 logements sociaux. Moi, j’ai fait en trois ans 2750 logements en tant qu’ingénieur chef de projet. Et c’est nous qui avons réalisé la première station de traitement des eaux usées en Côte D’Ivoire. Ensuite, vous avez aujourd’hui la commune de Yopougon qui est la plus grande commune de Côte d’Ivoire. C’est mon ami Daouda Fofana que j’ai affecté sur ce projet. C’est moi qui ai affecté mon ami Bakary Koyo Zoumanigui sur le chantier d’Alpha 2000. Alpha 2000, c’est un tour de plus de 20 étages avec trois étages en sous-sol. C’est Zoumanigui qui a géré ce projet sous mon contrôle. C’est moi qui ai géré tous les projets de l’armée en Côte d’Ivoire. Le camp para-commando de Koumassi, les cinq villas des généraux à l’aéroport d’Abidjan, le deuxième bataillon de Daloa, le camp de gendarmerie d’Agban, le troisième bataillon de Bouaké, Akouedo ancien et Akoido nouveau à Abidjan, le camp de gendarmerie etc… En six ans en Côte d’Ivoire de 1973 à 1978, j’ai accumulé plus de 20 ans d’expériences professionnelles. Et en fin 1978, j’ai démissionné de ce bureau pour créer mon propre bureau d’études. Et comme je ne devais pas faire la concurrence à un ex-patron, le code de travail t’interdit de t’installer dans un rayon de 350 mètres et pendant une période de trois ans, il fallait que je m’éloigne de là-bas. Mais ce qui était derrière tout ça, c’est que j’étais le chef de l’opposition à Abidjan. Je ne pouvais pas quitter Abidjan pour aller ailleurs. Donc, ça a été ma chance aussi. C’était le travail visible. Et le travail invisible était l’organisation des Guinéens. Il y a beaucoup de gens qui ont dit que Mansour Kaba fait de la politique parce qu’il a de l’argent. Non. Moi, en venant à Abidjan, j’ai emprunté le prix de mon billet d’avion et c’est la politique qui m’a envoyé à Abidjan. C’est la politique qui m’a envoyé aux affaires et nous avons mené les affaires pour couvrir nos activités politiques. Je suis dans la politique depuis 1955 avec mon grand Mamadi Kaba qui était le patron de la CNTG ici.

Vos détracteurs vous accusent d’être le défenseur du concept Mandé-Djallon. Que répondez-vous à ceux-ci ?

Je suis venu en Côte d’Ivoire en tant que militant politique. C’est incidemment que j’ai fait tout ce que je viens de vous étaler. Mon travail était un travail politique. Un jour, nous étions en réunion de regroupement des Guinéens de l’extérieur avec Siradiou Diallo, Ibrahima et d’autres. Nous avons dit qu’on ne peut pas continuer à parler d’opposition contre le régime du PDG en restant en Europe. Qu’il faut que certains d’entre nous se sacrifient et partent en Afrique pour organiser les Guinéens qui sont dans les pays voisins. C’est comme ça que j’ai été affecté politiquement à Abidjan. Je me suis endetté pour aller à Abidjan. Le mouvement ne m’a pas donné un centime. J’ai toujours été militant et j’ai lutté contre la dictature du PDG, contre Lansana Conté et c’est arrivé ici que j’apprends qu’il y a des séquelles de l’esclavage. Les séquelles sont souvent dures à supporter que l’esclavage lui-même parce que leurs grands pères étaient esclaves. Mais ceux qui, même s’ils sont milliardaires, ils sont traités en moins que rien, cela fait mal. Moi, je me suis battu pour la liberté en Guinée et quand j’apprends qu’un groupe de Guinéens sont encore esclaves, je me bats contre ça. Cela n’a rien à voir avec les ethnies. Ça à voir avec le manque de liberté de ces gens-là. Lorsque je suis venu, j’ai dit à un ami qu’il y a encore des séquelles de l’esclavage du Fouta. Il me dit que je ne suis au courant de rien et que ces gens-là sont organisés dans Mandé-Djallon. Ceux qui critiquent Mandé-Djallon ne savent rien de Mandén-djallon. Mandén-djallon a été créé des années et des années avant notre arrivée en Guinée. Ce sont les gens qui ont vécu ce système-là et qui sont encore sous les séquelles de l’esclavage qui ont créé Mandé-djallon. Au lieu de fouta-djallon, ils ont voulu Mandé-djallon. Si tu prends les djallonkas, ou ils sont Malinkés ou Soussous, ils ne sont pas Peulhs. Ils ont voulu tout simplement rappeler leur origine mandingue. Pour moi, la liberté est précieuse. Qu’on te dise pour tes baptêmes, tu dois tuer un bouc noir. A quel titre on doit t’interdire de tuer un bélier blanc ? Au cimetière, tu dois être enterré là. Tu as un cimetière à toi. Tu n’as pas le droit d’épouser mes filles mais tes filles sont à moi, je ne les épouse même pas. Je les prends de force. C’est ce système inégalitaire que je combats. On ne peut pas parler de démocratie et accepter cette différentiation. Je vous donne un autre exemple qui est le suivant : Chez mon oncle Pr Lanciné Kaba à Chicago aux USA, il y a des professeurs guinéens qui étaient en séminaire là-bas. Pr Lanciné a invité ces Guinéens à diner ou à déjeuner chez lui. Son épouse finit de préparer la table et elle vient dire aux invités de son mari que la table est prête et qu’ils peuvent venir manger. Tout le monde se lève et puis tout d’un coup on entend quelqu’un dire : tu oses passer devant moi ? Le Monsieur a fait marche arrière, l’autre est passé, s’est assis et c’est après que le premier est venu s’asseoir. Vous trouvez cela normal dans un pays démocratique entre citoyens égaux du même pays ? Et le premier qui s’était levé est d’origine d’esclave djallonka et l’autre peulh noble. Je trouve ça scandaleux que ça se pratique au Fouta ou partout où des Guinéens se trouvent. Je le combattrai toujours. Il ne faudrait pas qu’ils pensent que comme je ne suis plus dans le RPG Arc-en-ciel, je vais m’entendre avec eux. Je ne m’entendrai jamais avec eux tant que ce système de discrimination persisteras au Fouta. Et si ça existait ailleurs comme ils le disent en Guinée, je mènerais le même combat. On me dit souvent qu’il y a des griots chez nous. Je dirai à ces gens-là que le griot est noble. Chez nous, le griot ne fait pas la guerre parce que c’est un groupe qui ne doit pas disparaître. C’est le groupe qui parle de l’histoire du Manding. Je préfère envoyer mon fils à la guerre que mon griot. Parce que c’est lui qui peut dire demain qui je suis, qui a été mon père et qui a été mon arrière grand-père. Les griots sont des nobles dans le travail, c’est des historiens et c’est un groupe qu’on cherche à sauver. Quelqu’un qui ne fait pas la guerre, ça veut dire qu’on le met au-dessus de tout le monde. On ne peut pas comparer la situation des griots au manding à l’esclavage. Il y a des gens qui me combattent en disant oui, vous savez aussi des griots et des artisans chez vous. Le métier d’artisan et de forgeron sont des castes. Ils sont des spécificités qui doivent être préservées. Alors, cela n’a rien à avoir avec l’esclavage. Je précise que l’esclavage a été introduit au Fouta après la bataille de Talansan en 1728 et Samory est venu un siècle après dans le but de les sauver (les poulos). Vous savez comment ? D’abord chez nous. Alpha Kabinet Kaba a participé à cette bataille qui a donné la victoire à Karamo Sambégou. Alpha Kabinet Kaba de Kankan a participé à la conférence qui a créé l’Etat Théocratique du Fouta. Les peulhs ne voulaient même pas qu’il (Alpha Kabinet Kaba) retourne à Kankan, mais Kankan les avait fait sortir parce que Condé Bréma avait combattu Kankan. On dit vous, vous sortez pour aller ailleurs. Si Condé Bréma détruit Kankan, vous reviendrez plus tard pour reconstruire la ville. C’est comme ça exactement que Alpha Kabinet Kaba est sorti et il est tombé au Fouta sur la guerre des peulhs contre des diallonkés. C’était une guerre d’islamisation. Mais une fois que les gens sont islamisés, je n’ai jamais vu dans un pays au monde où une guerre d’islamisation a fini par être une guerre de fabrication d’esclaves. Et c’est ce qui s’est passé au Fouta au 18ème siècle. Samory est venu au 19ème siècle, un siècle et quelque après. Alors, ceux qui disent qu’il n’y avait pas d’esclavage chez eux et c’est Samory qui a introduit les esclaves au Fouta est archi-faux parce que Samory est venu après Alpha Kabinet Kaba. Les houbous c’étaient des peulhs musulmans qui se sont révoltés contre l’esclavage et contre les Almamy. Ils ont tué l’Almamy qui régnait à l’époque et autres de ses enfants. Et les peulhs ont fait appel à Kankan et c’est Kankan qui a demandé à Samory de venir libérer les Almamy. Samory a fait le siège pendant neuf (9) mois la capitale des houbous et les gens exterminés. Il a remis les peulhs à leur place. Naturellement quand il y a une guerre, il y a des gens qui viennent et qui restent. Mais ces gens-là, ce sont vos libérateurs. Par conséquent, vous ne pouvez les traiter en esclaves. C’est au Fouta qu’on a traité ces libérateurs en esclaves. Et la deuxième intervention de Samory, c’est la guerre contre les français. Et ça aussi c’est Samory qui a envoyé des sofas pour aider Bocar Biro contre les français alors que Alpha Yaya l’avait trahi. Alpha Yaya Diallo a trahi Bocar Biro et ce sont les sofas de Samory qui sont venus au secours. Le grand-père de l’actuel ministre de l’Enseignement Technique s’appelle Damantang qui a été président de l’Assemblée nationale. Le grand-père de celui là est mort comme sofa de Samory à la bataille de Porédaka pour empêcher la colonisation du Fouta. Ça veut dire que nous sommes liés par l’histoire mais ceux qui n’ignorent prennent les malinkés comme adversaires ou même des ennemis. Je me suis amusé à dire à deux de mes amis peulhs de la BAD ceci : mes amis, on vous a sauvé trois fois. On vous a aidé à vous installer au Fouta avec les Sambégou, Samory est venu vous sauver des mains, des griffes des houbous. Samory est venu encore pour aider Bocar Biro contre les Français. La quatrième fois, nous ne serons pas là.

Quel regard portez-vous sur les six années de gestion du président Alpha Condé ? 

Les six années de gestion du président Alpha Condé ont un seul point positif. C’est le barrage de Kaléta. Pourquoi le barrage de Kaléta ? Parce que le président Sékou Touré lui-même, malgré toutes ses bonnes relations avec les Arabes, les Iraniens, le monde occidental et le monde soviétique, n’a jamais pu réaliser un petit bout de barrage sur le fleuve Konkouré. Il y a même eu un conseil national de la révolution à N’zérékoré sur le barrage de Konkouré. Sékou Touré avait créé un ministère de l’Energie et de Konkouré et pendant 26 ans, il n’a rien pu faire. Si en six (6) ans, Alpha Condé a réussi à construire un barrage à Kaléta, c’est un bon point mais moi, j’aurai fait plus. Parce qu’il y a Kaléta, Souapiti et Amaria. Les gens disent qu’on a fait Kaléta et que le barrage a été échec. Je dirai à ceux-ci non. C’est des barrages en cascade. L’un sert à alimenter l’autre et l’autre sert à alimenter le troisième. C’est lorsque les trois barrages seront terminés que le système sera complet avec 1500 MW. Et en ce moment la Guinée sera exportatrice d’énergie et sans parler des autres barrages. Nous sommes un pays béni de Dieu mais les êtres humains qui sont là surtout des dirigeants sont vraiment très loin de ce qu’on attendait d’eux. Les négociations qui ont abouti à la construction de Kaléta avaient été menées par nous sous la transition. Demandez à l’ancien ministre de l’Energie sous la transition, le colonel Sandé Mamadou. C’est lui qui a mené toutes les négociations et il m’a donné l’honneur de présider la dernière séance de négociation sur les projets du barrage de Konkouré. Donc, Alpha Condé est arrivé au moment où tout était déjà prêt. En dehors de ce barrage, je ne vois rien d’autre de positif dans le système d’Alpha Condé. Et plus de cela, amusez-vous à dresser la liste des ministres du Général Lansana Conté. Pointez ceux que le président Alpha Condé a récupérés comme ministres en six (6) ans et ceux que le Général Conté a utilisés pendant 24 ans. En six (6) ans, Alpha Condé en a pris plus de 20. Est-ce que c’est ça un changement ? Plus de 20 ministres de Lansana Conté sont ministres chez lui en six ans.

Nous sommes au terme de cet entretien. Un point sur lequel vous aimeriez revenir?

Mon dernier mot, c’est que nous avons décidé de créer notre parti politique et nous allons participer à toutes les prochaines échéances. Nous disons que si le peuple de Guinée nous fait confiance, nous, nous sommes des bâtisseurs. Nous avons fait la preuve un peu partout en Afrique et ailleurs. Par conséquent, j’ai hâte de faire un peu chez moi parce que j’ai aujourd’hui plus de 75 ans. Je vous remercie.

Propos recueillis par Youssouf Keita

+224 666 48 71 30

 

 

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