Bah Oury : ‘’l’Etat en Guinée est de type néo-patrimonial’’
À l’aune de mon expérience et de ma connaissance des réalités nationales guinéennes, le vrai problème de la Guinée est la crise de l’Etat. A cet égard, le livre de Bernard Ameillon écrit en 1964 intitulé « Guinée : le bilan d’une indépendance » est très instructif. L’Etat en Guinée est de type néo-patrimonial c’est-à-dire c’est un système politique de captation des ressources au service exclusif d’une minorité. En effet dans ce contexte la compétition politique et donc l’accession au pouvoir n’est qu’une manière d’accéder aux sources de richesse et d’enrichissement illicite pour entretenir une clientèle et des clans d’affairistes. Ainsi l’ethno-stratégie, la mauvaise gouvernance, l’instrumentalisation de la violence, et la violation des droits des citoyens ne sont que des attitudes secondes de la dynamique principale à savoir s’approprier des leviers de commande de l’Etat pour siphonner ses ressources. L’Etat colonial et l’Etat postcolonial sont de cette catégorie.
A ce niveau, le citoyen n’est qu’un simple rouage dans une logique d’exploitation qui ignore ses droits formels. L’Etat de droit n’est alors qu’un habillement verbal.
L’Etat néo-patrimonial a aujourd’hui atteint ses limites. D’où les crises que nous vivons. L’offre politique que nous promouvons est une alternative pour construire une forme d’Etat qui se réconciliera avec la société civile (sens de Gramsci et d’Hegel) et qui apportera le bien être à l’ensemble de sa population. Ainsi le nouveau cycle politique qui émerge est le dépassement de l’Etat néo-patrimonial. C’est un enjeu qui dépasse la Guinée car il concerne pratiquement la quasi-totalité des Etats africains. Réformer l’Etat pour vaincre la pauvreté, participer pleinement à la révolution numérique, et s’adapter aux nouvelles contraintes écologiques de changement climatique sont les enjeux de notre temps. Ceci est de loin plus passionnant et utile que de s’intéresser à des querelles byzantines et inutiles. Utilisons positivement notre énergie afin de construire enfin notre pays.
Bah Oury
Votre analyse est tout à fait juste et logiquement défendable sur toutes les tribunes universitaires du monde, Cher Frère et ami Mr. Bah Oury.
Mais c’est en même temps, une raison de plus, pour vous redire que votre courant de pensée quoique progressiste, ne peut pas du tout prospérer, s’il n’est pas porté par une synergie de forces capables de se fédérer ou de s’intégrer dans une formation politique large et qui soit capable de propulser vos forces, comme dans une logique vectorielle, c’est à dire dans une logique politique clairement orientée.
Votre place n’est pas du tout dans la solitude que j’observe actuellement. C’est une question de realpolitik pour vous, si vous voulez aller beaucoup plus loin sur le champ politique, afin de construire votre vision de la chose politique dans ce pays.
Or, je constate très malheureusement que votre situation actuelle qui consacre une certain évolution quasiment en solo, pourrait vous apporter de graves préjudices au regard de votre potentiel très fort au plan intellectuel et surtout au plan de vos convictions politiques.
Loin de moi la prétention de vous apprendre ce que vous devriez faire. Mais je crois qu’il est de votre intéret de mieux réevaluer la chose politique et le rapport des forces sur le terrain. Qui a dit qu’en politique, rien n’est impossible ?
Mr b