Le délit de la presse en droit guinéen (Par Aboubacar Koïta)

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Dans sa mission régalienne de diffusion et de traitement de l’information, la presse comme tout autre corporation se rend parfois coupable d’infractions qui sont la conséquence d’une analyse fallacieuse des faits, de propos déplacés ou des erreurs professionnelles de nature à porter atteinte aux droits des particuliers et à un degré supérieur, à l’intérêt et à la sûreté de l’État. Ces infractions sont qualifiées de délits de presse.

Mais d’entrée de jeu, force est de constater qu’il n’existe aucune définition concise et précise du délit de presse en droit guinéen. C’est la loi organique L/2010/002/CNT DU 22 JUIN 2010 portant sur la liberté de la presse en son Titre X y fait référence, en énumérant les infractions considérées comme délits de presse.
A ce titre, nous pouvons citer « les crimes contre la sûreté inferieur de l’Etat, les crimes de guerre, les délits contre l’autorité publique… ».
Une possible définition du délit de presse nous conduirait à l’appréhender comme étant, toute infraction commise par voie de presse, ou par tout autre moyen de publication ; mieux il s’agit de toute infraction dont la commission nécessite un élément de publicité, qui peut se réaliser non seulement par la voie de la presse, mais aussi du livre et tout autre moyen de publication.
Une définition bien plus plausible du délit de presse nous est donnée par Koen Lemmens. Celui-ci qualifie le délit de presse au moyen de la trilogie suivante : l’expression d’une opinion délictueuse, le délit de presse étant « un délit intellectuel » résultant de l’usage abusif de manifester une pensée ; par un écrit imprimé, pris au sens large du terme englobant ainsi le support ayant véhiculé l’opinion délictueuse quel qu’en soit la nature ; la publicité réelle et effective, se traduisant par la mise à la disposition du public

Les procédures judiciaires intentées contre les journalistes et autres professionnels des médias sont perçues comme une violation de la Loi L002 portant liberté de la presse, qui suppose que la peine d’emprisonnement est exclue pour les délits de presse. La présente réflexion vise à apporter des éclaircissements sur les dispositions légales et réglementaires applicables aux délits de presse en Guinée, étant donné que les délits de presse sont des infractions commises par voie de presse. Ce qui les caractérise, c’est l’élément de publicité, c’est-à-dire, le mode de perpétration d’une part, et l’intention coupable, d’autre part. Aussi convient-il de relever que le délit de presse peut être le fait d’un professionnel des médias comme d’un non professionnel qui se servirait d’un support propre aux médias pour commettre une infraction.

Sanctions des délits de presse :

contrairement à ce que beaucoup pensent, Le délit de presse est réprimé à la fois par des sanctions pénales, civiles et des sanctions disciplinaires.

Peines encourues :

En la matière, il existe à la fois un principe et une exception comme on aime à le dire en droit que c’est l’exception qui fait la valeur d’une règle.

Le Principe est la suppression de la peine d’emprisonnement qui est d’ailleurs l’esprit de la dépénalisation des délits de presse comme indiqué par STEFANIE, LEVASSEUR et BOULOC qui considèrent la dépénalisation comme abstention de poursuite ou l’application des peines symboliques.

Dans le cadre de la campagne menée par les journalistes en danger, la tendance est de considérer la dépénalisation comme étant la suppression de l’application de la peine de prison à l’endroit des auteurs des infractions commises par voie de presse.

A ce niveau, une précision est importante, il ne s’agit pas du tout de supprimer un fait infractionnel mais plutôt d’assouplir sa peine ; en d’autres termes commuer les peines de prison en des peines d’amande.

La loi L / 002 portant la liberté de presse énumère expressément les délits de presse pour lesquels la peine d’emprisonnement est exclue. Il s’agit à titre d’exemple de :

– Délits contre l’autorité publique, notamment le délit d’offense au chef de l’Etat puni à l’article 105 de la loi précitée ;
-Délits contre les personnes et les biens, telles que les infractions de diffamation et d’injures punies par les articles 108 et 109 de la même loi ;

-Délits contre les agents diplomatiques étrangers, les ministres des gouvernements étrangers et les ambassadeurs réprimés par le dernier alinéa de l’article 105 ; …

L’Exception est le maintien de la peine d’emprisonnement :

En effet, les professionnels des médias sont avant tout des citoyens comme les autres. A ce titre, ils répondent de leurs actes en cas de commission de délits de droit commun. En conséquence, la qualité de journaliste ne peut constituer un moyen d’exonération.

Ainsi, certaines infractions, bien que constituant des délits de presse, demeurent punissables de la peine d’emprisonnement en application des dispositions des deux derniers alinéas de l’article 99 de la même loi.
Sanctions disciplinaires :

Le journaliste auteur de délit de presse et de manquements aux règles de la profession ainsi que l’entreprise de presse sont soumis à des sanctions disciplinaires et administratives prononcées par l’organe de régulation, à savoir, la Haute autorité de la communication (HAC). Ces sanctions sont : l’avertissement, la mise en demeure, la suspension et l’interdiction conformément à l’article 51 de la Loi L/003 portant Attributions, Organisation, Composition et fonctionnement de la HAC.

Pour finir, il est de notre responsabilité de veiller à la consolidation de nos acquis démocratiques notamment la Liberté de Presse qui est le fruit d’un long combat et de lutter contre les velléités qui menacent cette liberté.

Aboubacar Koïta, société civile

 

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