Le Ghana et le Nigeria acceptent d’entrer dans l’Eco de l’UEMOA ? (Par Moïse Sidibé)

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Le Ghana et le Nigeria ont fait comprendre qu’ils acceptent de s’associer à l’Eco tel qu’il a été « habillé » en « déshabillant » le franc CFA de façon artificieuse ou spécieuse par Alassane Ouattara en présence de Emmanuel Macron à Abidjan ? Accord de principe ou définitif ?

Certains observateurs prennent cela avec beaucoup de doute et de pessimisme, cependant, ils n’en demandent pas mieux.

En mettant l’espoir et le doute dans la besace, que peut-on déduire ?

Dans la mission avortée de Conakry, L’ex-président béninois avait laissé entendre que les Anglophones lancent à chaque occasion des piques aux Francophones, les chambrant d’être les panards boiteux de la démocratie en Afrique. Conséquence : les Anglophones trainent la savate avant d’adhérer à toute initiative Francophone, et pour cause, l’orthodoxie financière et le respect du jeu politique, qui doivent aller de pair vont en impair.

Géo-politique dans un mouchoir de poche en Afrique de l’ouest

Si les élections démocratiques et les transitions politique n’ont rien à se faire reprocher au Ghana, au Nigeria, en Sierra Leone et au Libéria, il n’en est pas de même en Gambie, noyée entre les Francophones et qui pratique non pas le mimétisme du caméléon, mais l’homochromie du lézard. La différence est que le mimétisme est momentané, l’homochromie est une transformation…

La Gambie, longtemps caporalisée par le Sénégal pour une intégration « Séné-Gambie » qui tardait à être effective, était tombée dans l’influence politique de la Guinée de Sékou Touré dans les années 74-75, avec Dauda Kairaba Diawara. Les relations se sont encore renforcées avec le putschiste Yahya Jammeh, cette fois-ci par alliance. La Gambie « homochrome » pratiquait la même politique que les Francophones des années de plomb du parti unique, mais une mouche a piqué Yahya Jammeh pour jouer à une élection transparente. Nettement battu par un profane et novice du nom de Adama Barrow pistonné par le Sénégal tandis que la Guinée dormait sur ses lauriers secs. La Gambie lui glissa des doigts avec le départ de Yayah Jammeh à l’issue de mille tractations qui ont permis au perdant d’emporter un trésor de guerre.

Confidence: à ce sujet, la Guinée et le Sénégal se disent bonjour dents blanches, cœur noir.

Avec la Guinée-Bissau, il en est de même avec un peu plus de complication. Pendant la lutte du PAIGC (parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-vert), Amilcar Cabral, le président du parti, et Nino Veira, le ministre de la Défense, résidaient à Conakry; le secrétaire général du parti, Aristides pareira et Luis Cabral, le frérot de Amilcar, résidaient à Dakar.

Le 22 Novembre 1970, agression portugaise contre la Guinée; les prisonniers du PAIGC enfermés au chaud à Mamou, à plus de 300 km, ont été curieusement transférés à Conakry peu de temps avant l’agression. La libération des prisonniers par les agresseurs, qui étaient venus expressément pour cela, renforça les courants déjà existants au sein du PAIGC jusqu’à l’assassinat de Amilcar Cabral en 1973, peu de temps après avoir assisté à une prestation du Bembeya Jazz au Palais en compagnie de Sékou Touré…

Avec l’assassinat de Amilcar Cabral en Guinée et plus tard l’assassinat de Nino viera, devenu président par la suite, le front du PAIGC de Conakry s’éteignit. Depuis l’arrivée de Alpha Condé au pouvoir, il a tenté de regagner l’influence de la Guinée sur cet ancien allié, manque de bol, le Sénégal a déjà le pied dessus. La Guinée a payé économiquement, elle a payé de son sang pour la libération de Bissau. Avec l’élection de Umaru Cissoko Embalo, qui a affiché tout de suite et sans fard son penchant pour le Sénégal, la Guinée vient de perdre coup sur coup deux alliés de proximité…

Comme on le voit, avec, ne serait-ce que cette entourloupette dans l’azimut de la CEDEAO et de l’UEMOA, l’entente sera difficile entre les concernés, qui vont essayer de tisser et élargir leurs toiles avec d’autres affinités, en plus de leurs turbulences politiques internes, le Sénégal et la Guinée vont faire du spectacle.

Parler d’intégration économique dans ces conditions est aberrant. Avant la dernière fête de mouton, les populations guinéennes se plaignaient de la cherté du petit ruminant, les maquignons se plaignaient des multiples tracasseries routières, des barrières et barrages multiples, de la hausse du transport et des arnaques jusqu’au niveau de l’aéroport. En mettant bout à bout toutes ces tracasseries, qui ne sont pas exhaustives, peut-on parler d’intégration politique et économique et la libre circulation des biens et des personnes? Et comme si cela n’était pas suffisant, le Nigeria ferme ses frontières et fait une incursion punitive au Bénin pour « concurrence déloyale ». Drôlement, la CEDEAO n’a même pas pipé, et le Bénin ne s’en était pas trop plaint… Les tortues qui savent où se mordre sans crier? En plus, dans la quasi-totalité des pays francophones, les velléités de tripatouillage de la constitution sont en vogue…

Sans une CEDEAO forte politiquement au niveau de ses instances pour se faire respecter par ses membres, si le plus fort peut aller donner une fessée au plus faible à tout bout de champ, si un pays est libre de faire comme bon lui semble à l’intérieur de ses frontières, aucun règlement supra national ne sera respecté au sein de la CEDEAO comme à Doumbelane, c’est un projet voué à l’échec, et cette fois serait la bonne à tout jamais.

Répétition de l’Histoire ?

Les Africains avaient confondu vitesse et précipitation en 1963 pour la création de l’Organisation de l’Unité Africaine (unité sans union des multiples fractions (pays révolutionnaires, pays de l’OCAM (Organisation commune africaine et malgache), pays arabes, pays francophones et anglophones, pays lusophones…), c’est mettre la charrue devant les bœufs (qu’est-ce qui doit tirer l’autre?).

Rien ne sert de courir, il faut partir à point. L’OUA a voulu brûler les étapes, elle s’est cassée en 1984. Il lui a fallu une vingtaine d’années pour renaître de ses cendres, et son initiateur, qui est, en fait, celui-là même qui avait œuvré à sa mise à mort, a été mis à mort devant l’Afrique tout entière impuissante.

En serait-il de même avec l’Eco, qui semble vouloir brûler aussi les étapes en voulant sauter sur des obstacles et aspérités identifiés plus haut ?

Le Ghana et le Nigeria pourront se sentir à l’aise dans un tel milieu, sans changer de ligne politique, ou veulent-ils intégrer l’Eco pour mieux mimer la politique des Francophones ? Jusqu’à preuve du contraire, il nous semble qu’il y a quelque chose qui cloche dans cette décision d’adhésion sans ambages du Ghana et du Nigeria, qui doivent être plus pragmatiques dans les intentions, eux qui sont plus méticuleux et plus circonspects que ça, d’habitude.

Le défi de ce 21ème siècle est que l’Eco devienne une monnaie convertible, qu’elle soit aussi une devise pour ne pas être sous le joug du Dollar, de l’Euro, du Yen ou du Yuan…

Comment y parvenir car, une monnaie forte n’est pas la propriété et le propre des républiques bannières…

Moise Sidibé

 

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1 commentaire
  1. Thierno dit

    Très bonne analyse, M. Sidibé. Je comprends votre perplexité.
    Mais au fait, vous pensez vraiment que la monnaie, qui représente le système nerveux de l’économie voire de la société, peut se définir selon des caractéristiques à l’emporte-pièce répandues à force de manipulation populiste par des activistes qui pour la plupart n’y comprennent pas grand-chose, pour ne pas dire, rien ?
    M. Sidibé, les intellectuels de nos pays dont vous êtes un éminent exemple ont considérablement failli à cet égard. Ils ont pour rôle, entre autres, d’éclairer voire guider la population par des avis pertinents et objectifs, voire une vision stratégique claire et maîtrisée. Ils ont failli en succombant, comme l’essentiel de notre jeunesse fragile, à la manipulation savamment orchestrée par des soi-disants activitistes et certains intellectuels en mal de publicité ou déçus des régimes en place. Certains sont assurément de bonne foi, mais celà n’excuse en rien le panurgisme qui les a saisis en ces circonstances.
    Nous devons nous débarrasser des scories de notre histoire en générale et surtout coloniale en particulier. Mais, faisons-le avec stratégie, une vision claire et de façon ordonnée et méthodique ; pas de façon aussi chaotique et anarchique, en suivant des courants que nous ne maitrisons ni n’avons définis. Ne donnons pas raison à Léopold Sédar Senghor qui disait : La passion est nègre et la raison, hélène.

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