Quand le chef est malade (Par François Soudan)

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Si la courageuse révélation, le 27 juin, par le leader de l’opposition zimbabwéenne, Morgan Tsvangirai, du cancer dont il souffre et son appel à en finir avec l’omerta qui entoure l’état de santé des responsables politiques ont secoué l’opinion bien au-delà des frontières de son pays, c’est bien parce qu’en Afrique le sujet est encore très largement tabou.

Jusqu’au bout, la direction du Front Polisario a dissimulé le cancer du poumon dont souffrait son chef, Mohamed Abdelaziz, et qui a fini par l’emporter il y a un mois. Et, jusqu’au bout, l’opacité qui entoure la maladie ô combien visible du président Bouteflika continuera de masquer aux yeux de l’opinion algérienne la réalité de ses capacités à diriger. En la matière, il est vrai, les chefs africains ont de qui tenir.

Contrairement aux États-Unis, où la règle de transparence sur l’état de santé des présidents en exercice est impossible à transgresser depuis le début des années 1970, aucune loi, pas même non écrite, n’impose à leurs homologues français de dire la vérité. D’où, de Georges Pompidou à Jacques Chirac en passant par François Mitterrand, une solide tradition hexagonale de dissimulation, de mensonges d’État et de promesses oubliées. Même si l’un et l’autre publient régulièrement leurs bulletins de santé, ce qui est un incontestable progrès, Nicolas Sarkozy et François Hollande ne dérogent pas à la tentation des petites cachotteries. Le premier a omis de signaler l’ablation d’un phlegmon de la gorge alors qu’il siégeait déjà à l’Élysée et le second, une opération à la prostate alors qu’il s’apprêtait à y entrer.

Sur le continent, le mélange de secret, de pudeur et parfois de magie qui entoure la santé des chefs – en particulier en Afrique subsaharienne, où rares sont les maladies reconnues comme étant d’origine purement naturelles – fait le miel des réseaux sociaux et de leur litanie permanente de gossip. La tendance qu’ont les présidents à aller se faire soigner – ou contrôler – hors de leur pays ne fait évidemment qu’accélérer le débit des rumeurs.

Si les Camerounais ont fini par ne plus s’émouvoir des fréquents check-up de Paul Biya à Genève, chaque hospitalisation parisienne d’Idriss Déby Itno, d’Alassane Ouattara ou d’Abdelaziz Bouteflika continue d’alimenter l’usine à potins, et vous ne trouverez pas un seul Nigérian pour croire en la version officielle du long séjour médicalisé de Muhammadu Buhari à Londres au mois de juin : une simple otite.

La liste des chefs d’État régulièrement donnés comme subclaquants est impressionnante. Ces dernières années, l’internet, médecin aussi fiable que le sont les Diafoirus de Molière, a cru diagnostiquer des cancers foudroyants chez Obiang Nguema Mbasogo, José Eduardo dos Santos, Robert Mugabe, Yoweri Museveni, Omar el-Béchir, Denis Sassou Nguesso, Alpha Condé, Ibrahim Boubacar Keïta et même Faure Gnassingbé ! Un moment en vogue chez les docteurs ès bobards, le sida est désormais réservé aux ministres, conjointement avec le diabète et l’éthylisme, tant il est vrai que l’affubler d’une maladie imaginaire est encore l’un des meilleurs moyens de discréditer un adversaire aux yeux de l’opinion.

Imaginaire ? Pas toujours. Il arrive que les réseaux sociaux disent vrai, et certains des chefs précités souffrent effectivement de ce dont on les croit atteints. Si, à l’exception notable des Sud-Africains – qui disposent d’infrastructures médicales de pointe -, la plupart d’entre eux, ainsi que leurs familles et collaborateurs, choisissent l’exit option pour aller se faire soigner et font parfois venir à grands frais des professeurs de médecine occidentaux pour un toucher rectal ou une dent cariée, c’est hélas parce qu’ils n’ont pas confiance en leurs compatriotes. Ni en leur compétence – même s’ils ont été formés dans les meilleures facultés du Nord -, ni dans le matériel dont ils disposent – ce qui est un aveu d’échec pour toute politique de santé digne de ce nom -, ni, surtout, dans leur discrétion. « Vous voulez que mon bulletin de santé soit dans la rue ? Autant faire la consultation en public ! » s’exclamait il y a peu un chef d’État à qui nous faisions la remarque. Triste constat… lire la suite sur Jeune Afrique en cliquant ici

par François Soudandirecteur de la rédaction de Jeune Afrique.

 

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