Rompre la chaîne du Covid-19 : implications pour les populations

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Introduction:

L’apparition, il y a quelques mois, du corona virus en abrégé COVID-19, marquée par sa rapide propagation, sa virulence inédite, l’absence notoire des médicaments connus pour le combattre, et les rafales de désolations qu’il sème en cascades sur son passage ont provoqué la stupeur générale chez les populations et conduit les gouvernements du monde entier à engager des batteries de mesures pour prémunir leurs populations contre les effets dévastateurs de ce fléau qui endeuille les familles. L’application de certaines mesures, tel le confinement, a parfois pris des allures martiales dans plusieurs pays avec des répercussions fâcheuses sur le quotidien des populations à cause des graves distorsions socioéconomiques que cette mesure provoque le long de la chaine des valeurs des biens et des services.

  1. Des répercutions des mesures édictées sur le quotidien des populations.

L’une des implications directes des mesures destinées à contrer la progression du COVID-19 est le choc brutal que les ménages, les entreprises et les Etats ressentent diversement à savoir:

  1. La chute brutale des revenus des milliers de petits marchands et marchandes des capitales et des grandes villes d’Afrique au Sud du Sahara qui s’engouffrent tous les jours à partir de 5 heures du matin dans les minibus et/ou les taxis crasseux qui s’élancent sur les routes crevassées à la quête de quelques sous nécessaires à faire bouillir la marmite le soir; des travailleurs au col bleu qui vivent de modestes salaires qui se compensent par des prêts contractés auprès de petits détaillants en vue de joindre les deux bouts, entre deux mois; des tacherons qui vivent de petits boulots journaliers; des retraités et autres catégories socioprofessionnelles qui reçoivent les rémittences expédiées des régions lointaines ou les rentes foncières (loyers de maisons et/ou d’espaces) et autres loyers de biens matériels (machines, équipements roulants, de production, de transport, etc.); des paysans et des paysannes qui parcourent plusieurs kilomètres de pistes herbeuses pour vendre quelques kilogrammes de produits agricoles sur les marchés forains; des entreprises dont les chiffres d’affaires chutent; et l’Etat dont les recettes fiscales et autres revenus s’effondrent, est un manque à gagner grave pour ces éléments.

Les faits montrent que pour corriger cette carence notoire, en termes d’opportunités et de revenus perdus, ces groupes recourent généralement à différentes méthodes détournées pour combler ce manque à gagner. C’est ainsi que,  les ménages recourent à l’économie souterraine ou au marché noir pour se pourvoir en aliments et autres biens; les entreprises contournent les règles établies par le législateur pour se maintenir dans la course au profit; les gouvernements privilégient les solutions monétaires indues de la planche à billets. Ces pratiques sont sources d’inflation monétaire, donc d’aggravation de la situation économique des populations.

  1. Les risques de pénurie alimentaire. Une autre répercussion du confinement est le risque de pénurie alimentaire. En effet, la course effrénée à l’approvisionnement individuel en denrées alimentaires à la quelle les ménages se livrent pour cause d’incertitudes, la distorsion des échanges intra-régionaux, facteur de rééquilibrage automatique de l’offre et de la demande des produits alimentaires entre les régions, la réduction éventuelle des volumes exportables du riz dont un grand nombre de pays Africains dépendent lourdement pour nourrir leurs populations, et les faibles quantités des denrées produites localement, réduisent l’offre et accroissent la pression sur les maigres stocks d’aliments disponibles surtout en période hivernale qui s’annonce.
  1. Le poids de la dette extérieure. La demande intérieure en ressources de tout genre pour contrer la propagation du COVID-19, l’obligation de fourniture des services publics, et l’acquittement de la dette extérieure, imposent les choix stratégiques aux gouvernements d’Afrique au Sud du Sahara. Soit orienter les maigres ressources budgétaires vers la satisfaction de cette demande intérieure pressante et croissante en santé, en alimentation, etc. ou acquitter la dette extérieure qui absorbe entre 50 à 75% du Produit Intérieur Brut (PIB). Toute chose qui contribue à maintenir les populations dans le cercle vicieux de la pauvreté. 
  • De la stratégie de sortie de crise.

Briser rapidement la chaine du COVID-19, revigorer celle des valeurs socio-économiques durement éprouvée par les mesures de protection contre ce virus et accélérer la relance des activités productives sur le court, le moyen et le long terme sont les défis qui interpellent désormais les gouvernements.

Hormis les dispositions mises en œuvre ici et là pour aplanir les effets pervers du confinement sur la vie des ménages et des entreprises, à savoir: la révision du prix du carburant, la subvention des denrées alimentaires, la mise en place des fonds de riposte, l’appui à la production vivrière et aux entreprises, l’élargissement fiscal, le renoncement aux salaires, et autres mesures d’assouplissement du choc causé par le COVID19, il serait intéressant de mettre l’accent sur les aspects ci-dessous:

Le renforcement des opérations de Détection, d’Isolement et de Traitement (D.I.T) des malades. En attendant de disposer des ressources suffisantes pour réaliser les tests de dépistage à grande échelle, les autorités sanitaires peuvent recourir aux services des Thermo-flasheurs Indépendants (T.F.I) qui contrôlent les températures des usagers et autres visiteurs à la rentrée des bâtiments publics, des entreprises privées, des chantiers, des marchés, des prisons, sur les routes et autres endroits fréquentés par les populations. Les données recueillies dans ce cadre serviront d’échantillons que les services statistiques compétents analyseront pour déterminer la probabilité de propagation du virus et formuler de nouvelles propositions de sensibilisation des populations. L’Etat pourrait faciliter l’acquisition et recommander l’utilisation de ces petits appareils dans les entreprises, les familles, les transports, les écoles, etc. 

  1. La surveillance des prix des produits agricoles sur les marchés. Elle vise surtout à mesurer le niveau de l’offre et de la demande des produits alimentaires sur les marchés afin d’envisager les mesures de régulation appropriées et éviter les pressions susceptibles de provoquer les tensions alimentaires. Le concours des institutions spécialisées dans le financement, la collecte, le traitement et l’analyse des prix est à considérer à cet effet. Ces institutions aideront à relever les prix courants du riz et d’autres produits de grande consommation en début et en fin de chaque semaine dans le but d’aider à la formulation de recommandations et la prise de décisions informées en ce qui concerne l’approvisionnement des marchés.
  1. La lutte contre les rumeurs et les fausses informations. L’avènement des réseaux sociaux et d’autres supports de diffusion des informations offre aux marchands de rumeurs de tout acabit de concocter et répandre les informations de tout genre sur les origines, les causes les effets, et les moyens de traitement du COVID-19. Les rumeurs et les fausses informations créent la confusion et la suspicion qui engendrent la psychose, la peur et la panique chez les populations. Elles développent les sentiments de discrimination, de stigmatisation, et de haine de certains groupes sociaux vis-à-vis d’autres.
  1. Le combat contre la corruption. Les contributions en biens matériels et/ou en ressources financières que l’Etat, les donateurs, les entreprises et les personnes de bonne volonté consacrent à la lutte contre les pandémies en général et le COVID-19 en particulier, font l’objet de la convoitise des agents véreux de l’Etat chargés de la gestion de ces ressources précieuses en ces moments critiques. Pour minimiser les risques de détournement de ces ressources, les pouvoirs publics devront mettre en place un dispositif rigoureux de suivi et de contrôle. Ceci consiste par exemple à définir les critères objectifs de sélection, la taille, la méthode, les délais d’allocation, le suivi des bénéficiaires, etc., afin d’éviter la dilapidation de dites ressources par ces cadres malveillants. 

Le COVID-19 a mis au grand jour l’extrême fragilité de nos systèmes de santé caractérisé, entre autres, par l’insuffisance notoire des équipements et du personnel soignant compétent, la vulnérabilité de nos populations dont les conditions de vie déjà épouvantables, se sont gravement détériorées. Il a, en outre, montré les pires limites du modèle économique basé sur l’aide, l’endettement, et la corruption sur lequel les pays d’Afrique au Sud du Sahara ont bâti leur politique de développement et ravivé l’instinct de la conservation du soi ou le ‘’chacun pour soi, Dieu pour tous’’ au détriment de la solidarité agissante qui caractérise les relations humaines.

Les gouvernements d’Afrique au Sud du Sahara doivent tirer les leçons de cette épreuve et proposer les solutions innovantes pour sortir les populations de l’angoisse et de l’immobilisme économique provoqué par le COVID-19. Ils doivent concevoir les programmes qui mettent l’accent sur le développement des ressources locales et l’élimination systématique de la corruption, cet autre virus dangereux qui dévore le bien-être des populations. 

Par Mamy KEITA

Agroéconomiste, 

Tél. 620 88 49 98

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